Ferroviaire : le chinois CRRC en passe de mettre un pied en Allemagne

Le géant du ferroviaire met la main sur l’activité de production de locomotives du groupe allemand Vossloh. Si elle obtient le feu vert des autorités compétentes, cette opération permettra à CRRC d’apprivoiser un marché européen très régulé qui lui a jusqu’ici résisté.

Après plusieurs tentatives, ce pourrait être la bonne et elle concrétiserait les craintes du ministre français de l’Economie, Bruno Le Maire, et de son homologue allemand, Peter Altmaier. Le géant chinois de la construction ferroviaire CRRC a fait une offre d’acquisition de l’activité de production de locomotives du groupe allemand Vossloh qui a été acceptée par le conseil de surveillance de ce dernier. Cette acquisition va lui permettre enfin de mettre un pied sur le marché allemand du ferroviaire.

L’inexorable montée du péril industriel chinois

Basée à Werdohl en Rhénanie-du-Nord-Westphalie, Vossloh a précisé lundi 27 août avoir vendu cet actif déficitaire à CRRC Zhuzhou Locomotive, filiale de China Railway Rolling Stock Corporation. L’opération, dont le montant devrait avoisiner quelques millions d’euros selon Vossloh, doit encore recevoir le feu vert des autorités compétentes en Europe et en Chine, « en particulier en ce qui concerne le contrôle des fusions et à l’approbation des lois sur le commerce extérieur », indique le groupe allemand dans un communiqué.

Apprivoiser la régulation européenne

La vente de son activité de production de locomotives, basée à Kiel, dans le nord de l’Allemagne, s’inscrit dans la volonté de Vossloh de se concentrer sur l’infrastructure ferroviaire (rails et aiguillages). Le groupe avait déjà vendu dans ce cadre ses divisions Véhicules ferroviaires et Systèmes électriques en 2015 et 2017. « Avec la finalisation de la transaction actuelle, la restructuration du groupe aura été menée à bien », conclut l’entreprise.

Pour le chinois CRRC, cette acquisition est stratégique car elle doit lui permettre d’apprivoiser la régulation européenne en matière d’homologation grâce à l’expertise de Vossloh. Jusqu’ici, faute de maîtriser ces procédures longues et complexes, le groupe a échoué dans plusieurs appels d’offres pour la vente de locomotives et de rames sur le Vieux Continent.

Une pierre dans le jardin bruxellois

La situation géographique du marché allemand au carrefour de l’Europe, et son fort tissu industriel ferroviaire avec la présence de Bombardier, Alstom et Siemens, en font par ailleurs une base idéale pour rayonner sur le Vieux Continent. CRRC avait déjà tenté de s’y installer en faisant il y a plusieurs années une offre sur l’usine de locomotives de Skoda, finalement reprise par des investisseurs tchèques.

Le projet de rapprochement de Siemens avec Alstom , soutenu par la France et l’Allemagne, visait justement à créer un géant européen capable d’affronter ce mastodonte chinois, premier producteur de matériel roulant au monde, avec un chiffre d’affaires colossal de 26 milliards d’euros. « CRRC réalise 90 % de son chiffre d’affaires en Chine. Mais il n’y a aucune perspective d’entrée des Chinois en Europe dans un avenir prévisible », avait néanmoins jugé en février dernier Margrethe Vestager, la commissaire chargée de la Concurrence, pour expliquer son opposition à une fusion. Cette nouvelle opération pourrait bien lui donner tort.

Article Les Echos de Ninon Renaud ( Correspondante à Berlin) – 27/08 /2019

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